Espace naturel sensible et vivant, l’estuaire de la Gironde est également une artère majeure de communication depuis l’antique Burdigala. Impossible de dissocier l’histoire de Cordouan de celle des ports de l’estuaire : Royan, Blaye, Meschers, Pauillac, mais surtout Bordeaux, dont les phases de croissance s’accompagnent d’une forte pression des négociants et des marins pour améliorer la sécurité de la navigation. La tour du Prince Noir (1360) voit passer des bateaux chargés de vin à destination de l’Angleterre. Celle de Louis de Foix (1611) signale l’estuaire aux caboteurs, en particulier à une importante flotte hollandaise, et aux bateaux armés pour la grande pêche à Terre-Neuve. Les trafics se diversifient : vin, bien sûr, mais aussi sel de Saintonge et produits venus du Nord de l’Europe : poisson, drap, bois. Au XVIIIe siècle, Bordeaux et ses négociants prospèrent grâce au commerce colonial avec les Antilles, en particulier Saint-Domingue, et l’Océan Indien. On échange le coton, le sucre, le café mais aussi les hommes, la traite négrière permettant d’accumuler des fortunes considérables. C’est l’âge d’or du port de la Lune, dont les tableaux de Vernet montrent l’extraordinaire activité. Entre 1680 et 1780, on compte 2 à 3000 bateaux par an sur la Gironde, dont 7 ou 8 se perdent devant Cordouan. Bordeaux se spécialisant dans le commerce à longue distance, les ports secondaires de l’estuaire captent le cabotage, qui est alors le principal vecteur d’échanges entre les provinces européennes et françaises. L’amélioration constante des feux de Cordouan au XVIIIe siècle, jusqu’aux travaux de Joseph Teulère, doit être replacée dans ce dynamisme commercial et maritime de l’estuaire et de Bordeaux.